Peut-être ne faisait-il pas si chaud que ça en cette journée approximativement ensoleillée, mais cela n’empêchait pas Haruki de sortir avec un but bien particulier en tête. Le froid ne l’arrêtait pas, en mettant qu’il faisait froid, et puis, il n’était pas si frileux que ça.

Probablement que la génétique jouait dans ce détail. Ou alors, pas du tout. Probablement la 2nde solution. Peu importe. Il s’avança jusqu’au lieu qu’il avait choisi, ou plutôt qu’il choisissait souvent pour ce qu’il allait faire, tant qu’il n’y avait pas une foule occupant l’endroit.

Les terrains de sport était l’endroit vers lequel il se dirigeait, musique dans les oreilles, chantonnant moyennement.

A son arrivée, il remarqua, avec bonheur, qu’il n’y avait personne sur le terrain.
Tant mieux, c’était plus agréable, et puis il n’avait pas tant l’intention que ça de se donner en spectacle, même si en général, ça ne le dérangeait pas tant que ça. Il fit une fois le tour du terrain, en marchant, pour le fun probablement, mais aussi pour choisir l’endroit où il allait s’installer pour commencer son activité sportive.

Il lança sa musique, et se laissa aller.

La danse, le sport, étaient pour lui des moyens d’évacuer la pression qui pouvait parfois lui peser sur les épaules. Il n’en avait pas tant que ça actuellement, mais c’était toujours agréable de se lâcher, et puis actuellement, il prenait aussi l’air, et il aimait prendre l’air.

Sûrement que les gens le trouveraient bizarre s’il leur disait que l’air extérieur a toujours une odeur, que ce soit la nature ou la pollution. Blague à part, l’odeur de nature était infiniment plus agréable que la pollution qui pouvait être présente dans les grandes villes.

Et puis l’endroit où s’était posé l’académie n’était pas si pollué que ça, à priori. Ce n’était qu’une île.

Ou alors il n’était juste absolument pas au courant de la pollution qui se trouvait sur cette île. Ce qui était vrai.

Un bruit soudain, derrière lui, le sorti de ses pensées et de sa musique. Il se retourna vers la provenance de ce bruit en question, et, alors qu’il pensait trouver un simple animal, il trouva, étalé au sol…un élève. Un enfant. Un plus jeune que lui.

Il pouvait comprendre facilement que sa curiosité avait été plus forte que lui. Et ça ne l’ennuyait pas, il aurait sûrement fait pareil, étant enfant. Il s’approcha, tranquillement, alors que le plus jeune se relevait.

Il fut surpris d’entendre des excuses, mais sourit simplement.

« T’inquiètes pas pour ça, ça ne me dérange pas ! »

Un instinct sorti de nulle part lui dit de frotter les cheveux du gosse, mais sa conscience lui dit que c’était une idée pourrie. Il ne le connaissait pas ce gosse-là. Donc non on ne va pas faire ça.

Lorsque l’enfant parla de nouveau, le visage d’Haruki s’illumina. Il savait très bien que la vie tenait à plus que l’avis des gens, il l’avait largement appris, mais les compliments faisaient toujours plaisir. Surtout si ça concernait sa capacité à la danse.

« Merci beaucoup ! » dit-il avec un grand sourire, qui, s’il pouvait aller jusqu’à ses oreilles, il le ferait, mais en soi, c’est creepy, ce type de sourire.


« Tu es intéressé par la danse ? »

 

Alors qu’Haruki avait fini sa phrase, il réalisa que le plus jeune semblait se détendre. Il fut un peu surpris de cet élément, mais il se disait que ce n’était pas forcément surprenant. Après tout, il ne connaissait pas vraiment le jeune garçon, et probablement que lui ne le connaissait pas non plus.

En tout cas il était heureux de savoir que l’enfant c’était détendu, et même qu’il s’était mis à sautiller. Haruki ne put s’empêcher de rire un peu, attendri par la joie du plus jeune.

Sauf que cette joie-là ne dura pas. Haruki se demanda si sa question était mal placée… pour une réaction comme ça, cela voulait dire que c’était largement probable. Mais il n’allait pas insister, après tout, ça devait être un sujet compliqué. Beaucoup de gens pouvaient avoir des sujets compliqués, lui-même inclus, il n’allait pas continuer.

Il voyait bien le changement d’expression de l’enfant, il avait beau continuer à sourire, ce sourire était différent, et il n’y avait plus les sautillements si amusants qu’il avait effectué quelques instants auparavant. Mais il continua de parler, et Haruki retrouva un sourire lorsque le garçon parla de nouveau.

Il préparait sa réponse, mais celui-ci enchaînait. Il était content d’ailleurs, qu’il lui parle assez facilement, ça voulait dire qu’il était suffisamment confortable pour s’exprimer, et Haruki aimait bien ça. Le garçon, qu’il avait marre de dénommer de cette façon, lui semblait gentil. Sa compagnie était sympathique. Peut-être n’avaient-ils pas le même âge, mais peu importait. Haruki aimait pouvoir mettre les gens en confiance. Même si sa confiance personnelle envers les gens pouvait être bancale.

Il voulait demander qui était la personne qu’il connaissait, qui dansait aussi. Mais son intuition lui disait de ne pas le faire… Il sentait que le changement d’ambiance et d’expression un peu plus tôt et l’individu mentionné étaient liés. Ou alors son intuition était pourrie et ça n’avait rien à voir, mais dans le doute, le mieux était de ne rien dire.

Il fut surpris lorsque, d’un coup, l’enfant se mit à danser. Haruki fut surpris de ça, mais il le regarda faire. Bon, ce n’était pas parfait, mais lui non plus n’était pas parfait. Niveau danse, il allait toujours se dire qu’il pourrait progresser.

Il sourit et répondit.

« Je trouve que c’était bien. Et puis, si tu veux danser, je peux toujours t’aider. C’est comme tu veux. »

Il n’allait pas le forcer, car ce sujet semblait compliqué, comme il avait déjà remarqué, mais s’il voulait, cela plairait à Haruki.

« Je dirais que j’ai toujours été intéressé par la danse, mais ça ne fait réellement que quelques années que j’essaye de m’entraîner. Je danse tout seul, je… ne connais pas beaucoup de gens qui savent danser, ou qui voudraient danser avec moi. »

Peut-être était-ce ses cheveux qui continuaient de faire fuir les gens, ou son alice, ou juste qu’il n’avait pas demandé.

Les doutes d’Haruki concernant la bonne ambiance générale s’effaçaient peu à peu. Bon, l’enfant n’était pas forcément plus à l’aise, et il pouvait comprendre ça, ils étaient des inconnus pour le moment. Et il ne comprenait que trop bien le fait d’être mal à l’aise face à quelqu’un qu’on ne connaissait pas. Il l’avait été aussi, enfant. Maintenant, moins.

Mais malgré ça, le plus jeune n’avait pas encore montré envie de partir ailleurs, loin de lui. Après tout, il faisait ce qu’il voulait, si c’était ce qu’il voulait. Mais non, l’enfant semblait intrigué. Et ça ne dérangeait pas Haruki au contraire, il aimait toujours parler aux gens de choses qui l’intéressaient, si cela intéressait l’individu en face.

Il ne pensait que le plus jeune allait accepter sa proposition, et pourtant, il accepta. Un sourire marqua les lèvres d’Haruki en entendant sa réponse. Il était content de pouvoir apprendre la danse à quelqu’un. Bon, apprendre était sûrement un grand mot. Il n’était pas professeur, juste quelqu’un qui aimait beaucoup (trop ?) la danse. Rien de plus.

La danse était un exutoire très efficace, en soi. Il écouta l’enfant parler de nouveau et fut surpris des compliments qu’il lui fit. Ça se trouve, ses joues avaient légèrement rougit. Ou pas. Il ne pouvait pas se voir, faute de miroir. Tant mieux remarque. Il ne voulait pas savoir s’il rougissait ou non.

« Pourquoi ne serait-ce pas amusant ? Je pense que l’on peut s’amuser en apprenant, si on le fait bien. »

Si lui, il le faisait bien. C’était lui qui avait le rôle du professeur après tout. Mais il réfléchirait à tout ça en temps et en heure. La question suivante vint, et Haruki fut surpris. Pas de la question, mais surpris alors qu’il réalisait qu’il ne s’était pas présenté.

« Excuses-moi ! Je m’appelle Haruki. Et toi ? »

Voilà, faute rattrapée. Bon, ce n’était pas une faute, mais, c’était mieux de se présenter, surtout s’il prenait le rôle de professeur.

C’était assez drôle d’ailleurs, car il n’avait vraiment jamais enseigné quoi que ce soit, et il n’avait aucune idée de s’il en était capable ou non. Mais l’envie de faire plaisir à l’enfant, puis aussi peut-être la curiosité et la fierté personnelle, il ne le cachait pas, lui donnait envie d’essayer.

Au fond de lui, un léger stress s’installa. Car oui, il n’avait jamais enseigné quoi que ce soit, et était-il vraiment capable de prendre ce rôle ? Lui qui ne savait même pas ce qu’il ferait après le lycée, à part un rêve de danse qu’il voulait absolument réaliser. Lui qui avait besoin de tutorat justement pour ça.

Tant de doutes l’envahissaient, et pourtant, il ne voulait pas décevoir le plus jeune. D’ailleurs, en parlant de ce plus jeune, il avait bien envie de connaître son nom. Il se mit à repenser à ça, comme pour oublier son angoisse actuelle.

Haruki observait l’enfant devant lui, qui semblait amusé lorsqu’il s’était présenté. Et pour cause, car, Haruki l’apprit juste après, cet enfant se nommait Haru. Et cela le fit sourire. Peut-être pas drôle, mais peut-être que si, finalement.

« C’est vrai, ça l’est. »

Peut-être n’était-ce pas tant que ça un hasard, les noms contenant Haru n’était pas si rares que ça, au Japon, ils étaient assez fréquents, mais d’en rencontrer un, de Haru, dans cet établissement, c’était toujours fun.

« Enchanté, Haru ! »

Et puis, on n’a pas toujours l’occasion de prononcer son prénom. Haruki n’étant pas adepte des discours encourageants en face d’un miroir. Il trouvait ça absolument gênant même.
Puis il n’était pas adepte de se regarder dans un miroir, de toute façon. Non pas car il se détestait physiquement, au contraire, il avait appris à s’apprécier, après de longues années de doutes. Juste… Il avait autre chose à faire ? Et il n’était pas narcissique. Ou coquet.
Il appréciait la beauté, sur les autres. Pas lui.

Il fut sorti de ses pensées par une question du plus jeune. Quel genre de danse aimait-il ? Très bonne question.

« Oh, euh, je dirais que je connais bien la danse contemporaine, mais la première danse que j’ai connue, c’est les danses traditionnelles. »

Et pour cause, un jour, durant son enfance, avant son arrivée ici, sa mère l’avait emmené voir un spectacle, et tout de suite, il avait eu un coup de foudre pour ces danses japonaises.

Puis en grandissant, la danse contemporaine l’avait aussi intéressé. Mais peut-être reviendrait-il à son premier amour ?

Bizarre de parler de danse comme d’un premier amour, mais bon, chut. Personne n’avait besoin de le savoir, ça. A part lui. Il regarda le plus jeune garçon puis sourit.

« Et toi ? Tu as une danse qui t’attires ? »

Juste avant qu’il pose la question à propos de la danse, il avait réalisé que le plus jeune semblait s’impatienter. Il connaissait bien le fait de se lever sur l’avant des pieds, et puis reposer ses talons au sol, de façon répétitive. Il l’avait sûrement fait aussi durant son enfance. Mais il comprenait l’impatience d’Haru, sauf que, en même temps, il se demandait d’où venait tant de curiosité concernant la danse. Bon, les enfants sont toujours curieux, c’est connu, mais pourquoi la danse particulièrement ? Avait-il d’autres sujets qui l’intéressaient autant que ça ?

En vérité, il lui rappelait quand lui, enfant, avait commencé à s’intéresser à la danse. Devant une télé, voir des gens danser, ses yeux s’étaient écarquillés devant tant de beauté. Bon, peut-être qu’un enfant ne voit pas la beauté comme un adulte, ou un adolescent, mais tout de même. Il avait cru voir un trésor à ce moment-là.

Et Haru, il hocha la tête soudainement, de cette même façon, que lui-même le faisait quand le sujet de la danse était lancé.

D’ailleurs, il n’était donc pas le seul à être intéressé par les danses traditionnelles. En même temps, dans un pays comme le Japon, comment y échapper ? Les danses japonaises étaient incroyables, et avaient marqué son enfance, et même sa vie entière.

Peut-être devait-il avouer qu’il avait une énorme préférence pour ce type de danses, mais le contemporain était aussi intéressant à connaître.

D’ailleurs, s’il cherchait des informations sur les danses traditionnelles du pays de son père, ça pourrait être bien aussi non ? Il devrait essayer tiens.

« Je pense que les danses contemporaines peuvent être faites avec beaucoup de musiques différentes… tant que tu l’aimes. Peut-être que je me trompe aussi, mais la façon de danser, c’est aussi subjectif je trouve. J’aime bien avoir la liberté de choisir ce que je veux. »

Il réfléchit un moment, puis décida de parler des danses traditionnelles.

« Mais c’est vrai que les danses traditionnelles, ça a toujours été un grand coup de cœur pour moi. »

Il avait remarqué l’espèce de lapsus que l’enfant avait fait dans sa phrase, mais il sentait que s’il avait interrompu le mot qu’il comptait sortir, c’était pour une bonne raison, qui visiblement, ne faisait pas partie des sujets faciles à lancer.

« J’aimerais vraiment devenir danseur professionnel. »

Une question était sur le bout de la langue d’Haruki, mais elle ne sortait pas. Il ne savait pas comment la sortir, cette question. Il se doutait bien que la danse avait une importance pour le plus jeune, mais que c’était un sujet…compliqué. Et comment le lancer ? L’ambiance actuellement était agréable, et soit cette question gâchait tout, soit non, mais c’était du 50/50, et Haruki ne voulait pas casser l’ambiance.