Haruki termina l’histoire, se remémorant les soirées ou son père lui racontait ça, et comment son imagination fonctionnait énormément bien après ces histoires en question. Son imagination ainsi que ses rêves. Il sourit en se rappelant le nombre de feuilles couvertes de dessins d’enfant représentant ces créatures éthérées que ses parents retrouvaient les jours suivants.

C’était des bons souvenirs, tout ça. Puis il fut sorti de ses pensées par Lio, qui s’exprimait au sujet de cette histoire. Il fut surpris de sa réponse, s’attendant à une réponse satisfaite, comme quoi l’histoire était jolie, ou autre, ce qu’elle voulait. Mais ce qu’il eut à la place était… différent. Penser que des elfes seraient forcés d’aller dans une école aussi c’était… au départ impossible, puis surtout, un peu terre-à-terre, surtout pour une enfant de l’âge de Lio.

Haruki était convaincu que les enfants étaient souvent rêveurs, et il n’avait rien contre, au contraire, il comprenait totalement, mais là, au fond de lui, il était presque déçu de la réponse de l’enfant. Tant pis, ce sera pour une prochaine fois, peut-être. S’il lui racontait une autre histoire un jour.

Mais vraiment, son alice lui permettait de faire apparaître plein de choses, comme le chaton qui venait d’apparaître près d’elle, c’était déjà un exemple d’imagination fou, alors… Pourquoi ?

Il observa le chaton, puis Lio, puis réfléchit, jusqu’à ce qu’il voit apparaître un autre objet, pas une illusion cette fois, un objet bien réel, présent, un album vert, fait par sa mère et ce professeur Masao. Un album photo visiblement.

La première photo, elle fit la remarque comme quoi quand elle était bébé, elle était turbulente. Haruki observait la photo et l’album, riant un peu à la vue du professeur couvert de poudre.

Sa turbulence, c’était vraiment juste quand elle était bébé ? Non parce que, jusque-là, elle semblait assez énergique la gosse. Pas sûr que ce soit un truc de bébé, cette turbulence en question…

Il l’écouta raconter son enfance encore plus jeune qu’actuellement, puis fut surpris quand elle demanda si lui, il avait des photos.

Il est vrai que ses parents lui en avaient donné lors de son entrée ici, mais elles étaient bien rangées, bien cachées. Peut-être gardait-il plus de choses pour lui que Lio. Mais il en avait des histoires.

« Oh, j’ai des choses à raconter oui ! »

Peut-être que ces photos sortiraient-elles un jour.

« Ma mère adorait faire des spectacles, quand j’étais petit, des spectacles avec ses mains, des spectacles d’ombres, qui racontaient aussi des histoires. »

Comme un marionnettiste. Assez ironique, en soi.

Haruki observait Lio qui s’agitait, racontant une histoire sortant tout droit de son imagination. Il le savait qu’elle en avait, de l’imagination. Même si le fait de comparer les elfes à eux-mêmes l’avait un peu refroidi à ce sujet, il avait eu tort d’en douter durant quelques instants.

Si elle n’avait pas d’imagination, elle n’aurait pas pu sortir un récit comme ça si rapidement. Non pas que le fait de l’avoir, l’imagination, rende une personne plus rapide, mais tout de même, la différence pouvait se sentir. En tout cas, vu qu’elle avait levé le poing, cette histoire avait l’air de la motiver.

Il ne s’attendait pas, cependant, à ce qu’elle lui demande de faire des spectacles avec les ombres. Il savait le faire, il s’était entraîné, admirateur de sa mère lorsqu’elle lui faisait ces fameux spectacles. Bon, il n’attendrait jamais son niveau, mais il savait le faire. Et puis, c’était aussi en le faisant qu’on y arrivait. Et, il devait l’avouer, ça le tentait assez.

« Bien sûr, je peux en faire ! »

Il n’allait pas refuser, s’il pouvait en faire, un soir, s’il en avait l’énergie, il allait en faire. Mais il était trop tôt, ce n’était pas le soir, et ces histoires-là étaient mieux le soir. Enfin, c’est ce qu’il avait retenu de son expérience personnelle. Puis actuellement, il était occupé à écouter ce que Lio racontait.

La joie se changea d’un coup en…colère ? Et Haruki pourrait se dire surpris, mais au final, pas vraiment. Il n’avait pas vu autant de sentiments chez quelqu’un que chez Lio. Tout ça dans un corps d’enfant, ça devait forcément exploser. Plusieurs fois par jour visiblement.

Même lui explosait plus rarement. Enfin, niveaux sentiments du moins. Et il se trouvait tout de même pas mal expressif. Même s’il gardait la plupart de ses sentiments pour lui.

Il réalisa qu’elle avait les larmes aux yeux, et en fut surpris. Seul problème, il ne savait pas quoi faire. Il n’était pas le plus doué avec les sentiments, ni avec les enfants. Surtout pas avec les enfants.

Alors un enfant au bord des larmes, comment dire…Quoi faire ? Il ne connaissait pas la réponse, ce qui était dommage, car après tout, il se posait la question à lui-même…

Mais si Lio pensait que les gens, les adultes, d’ici, voulaient lui attribuer un rôle, ça voulait dire que lui aussi devait en avoir un. Bon, ce n’était pas l’impression qu’il avait depuis le début, mais s’il avait vraiment un rôle…Lequel était-ce ? Il n’en avait aucune idée, en vérité.

« Pourquoi serais-tu bizarre ? »

Haruki avait entendu parler de cette Académie Alice, qui, en soi, faisait la même chose que l’académie ou il était, mais, vu les expériences de sa mère en…infiniment moins bien. Il se demandait même comment la création d’une école pareille, pas nette comme il avait entendu, était passé sans problème.

Enfin, il y avait plein de possibilités pour qu’une école comme ça ait pu exister, et existe encore aujourd’hui visiblement, donc ce n’était pas une bonne idée de se demander le pourquoi et le comment de tout ce bordel. Tout ce qu’il pouvait dire, c’est qu’il remerciait sa mère d’être sa mère, et d’avoir trouvé l’Académie Howalon. Bon, nommer une académie sur une base de nourriture était assez étrange, mais, c’était assez amusant. Puis il n’allait pas se poser la question de ce qui passait dans la tête de la directrice.

Il écoutait Lio et ne put se retenir de rire lorsqu’elle se compara à un tyrannosaure, accompagné d’une imitation du dinosaure en question. Il s’étala sur son lit, sa crise de fou rire lui passant, alors que Lio prononça son nom.

« Que veux-tu me montrer ? »

Il observa le dessin qu’elle lui montrait. Bon c’était un dessin d’enfant, donc c’était représentatif d’un enfant, mais il n’allait pas juger, il n’était pas tellement dessin lui-même. Mais le fait qu’elle ait voulu représenter des elfes le fit sourire. Il était content que son histoire, la légende qu’il avait raconté, ait inspiré la petite.

« Je pense qu’il est possible qu’ils existent. Ils sont juste très discrets. Donc tant qu’on ne les a pas vu, ça veut dire que c’est totalement possible qu’ils existent. »

Après tout, même si c’était une légende des pays nordiques, du pays d’origine de son père, qui sait, ça se trouve c’était plus que ça ?

Que les gens se foutent de lui car il pensait ça, grand bien leur fasse, il n’en avait rien à faire, et puis après tout, eux, lui-même, avait un alice, qu’on pourrait aussi appeler un pouvoir magique si on était dans un univers de fiction quelconque, donc qui sait ce qui pouvait exister d’autres ?

Tellement de choses.

« Je suis sûr que tu en verras un jour ! Si tu as de la chance. »

Il la regarda accrocher le dessin qu’elle avait fait près de son lit puis sourit simplement à l’explication de l’enfant.

« Je pense que d’être bizarre et exceptionnel peuvent être la même chose. Après tout, il n’y a rien de négatif à être bizarre. Si les gens trouvent qu’on est bizarres, c’est eux qui ont un problème, pas nous. Si je suis bizarre, tant mieux. »

Il n’avait absolument rien à péter de l’avis des gens sur le fait qu’il soit bizarre ou non, donc bon. Il pourrait presque se vanter de l’être. Juste pour faire chier le monde.

A force d’être vu comme bizarre, notamment à cause de son physique, Haruki avait largement accepté l’idée d’être bizarre. Il avait arrêté de voir « tu es bizarre » comme un reproche.

Oh, il était bizarre ? Tant mieux. C’était un compliment, maintenant.

Il hocha donc la tête, approuvant les paroles de Lio lorsque celle ci disait que les elfes étaient très bizarres.

Haruki n’avait pas eu la malchance de connaître cette académie alice, grâce à sa mère, et vu ce qu’en disait Lio, il en était bien heureux. Merci Maman. Il ne comprenait pas pourquoi cet autre endroit soi-disant pour le bien des possesseurs d’alice existait, car il en avait conclu il y a de ça un moment, que cette académie n’en avait absolument rien à faire du bien-être d’enfants, de jeunes adultes, ou de qui que ce soit.

« Non, ce n’est pas pareil ici. Clairement pas. »

Sinon sa mère n’aurait pas accepté qu’il pose ne serait-ce qu’un pied dans cet endroit. Puis il était là depuis son enfance tout de même, et il n’avait aucun doute sur le fait que l’endroit n’était clairement pas ressemblant à l’autre endroit, que sa mère avait dû endurer durant sa scolarité, à cause de ce même foutu alice qu’il avait.

Foutu alice qu’il ne détestait pas tant que ça, c’était juste compliqué, en général. Enfin bon. Mais que ce soit pareil ou non, robotisé ou non, il se doutait bien que Lio n’était pas intéressée par ça. Et il n’allait pas le lui reprocher, elle faisait ce qu’elle voulait. Enfin autant qu’elle pouvait, pour une enfant de 9 ans.

Il savait bien qu’elle n’irait pas loin, mais il n’allait pas briser ses…rêves ? C’était son choix à elle, tant que ça lui plaisait réellement, tant mieux. Il ne se sentait pas responsable, au final.

Elle avait beaucoup (trop ?) d’énergie, elle était sympathique, mais il n’était pas une figure parentale. Et puis, lui-même se trouvait beaucoup trop jeune pour avoir la responsabilité d’un enfant.

Il fut sorti de ses pensées par de longues paroles de Lio, qui était visiblement décidée à poser plein de questions.

« Bien sûr que les étoiles ont des histoires ! Elles sont sûrement intéressantes. »

Regarder le ciel la nuit, les étoiles, c’était regarder dans le passé. Les étoiles ont vu tellement de choses, forcément, il y avait de longues histoires allant avec elles.

« Si tu m’en raconte, je le ferais aussi, oui. »

Haruki observait Lio, se demandant ce qu’elle allait dire concernant les étoiles. Après tout, elle lui avait confirmé qu’elle en raconterait, et que lui aussi. Il n’avait pas promis, mais au final, c’était semblable à une promesse. Et puis, il appréciait beaucoup les étoiles. C’est pour ça qu’il avait dit qu’elles en avaient, des histoires.

Mais pour l’instant, ce ne fut pas le sujet qui sorti des lèvres de Lio.

Elle reconfirma pour la énième fois qu’elle quitterait cet endroit et que seuls sa mère et Masao la retrouveront, et qu’ils garderont ça secret car ils veulent la voir heureuse.

Au fond, Haruki se doutait qu’ils l’avaient envoyée ici, après cette Académie Alice lamentable, justement car ils voulaient qu’elle soit heureuse. Il ne pouvait que comprendre à quel point c’était difficile pour un jeune enfant de se trouver loin de sa famille, après tout, il l’avait vécu aussi, au tout début de sa scolarité ici. Bon, il avait toujours pu contacter ses parents, mais ce n’était pas pareil que de vivre avec eux, quand tu as 10 ans.

Et peut-être avait-il été rebelle aussi, au début, mais ça lui était passé, il s’était habitué au lieu. Et puis, en soi, il n’avait jamais voulu fuir. Donc il n’était pas aussi…rebelle, que Lio l’était actuellement.

Enfin, tout ça, il ne le dirait pas, ce n’était pas grave de la laisser rêver, si ? Eh bien tant pis. Il n’était pas un connard, il n’allait pas briser les rêves, bien qu’étranges, de cette enfant têtue.

Puis vint le sujet d’Orion.

S’il connaissait Orion ? Bien sûr qu’il connaissait Orion. Encore une fois, les étoiles, ça l’intéressait tellement, beaucoup trop peut-être, qu’il pouvait feuilleter chaque livre aux sujets des constellations, galaxies, planètes, étoiles, univers.

« Oui, je connais Orion. »

Elle doutait de la véracité de l’histoire qu’on lui avait raconté. Et lui, il connaissait la légende d’Orion qui devint constellation, mais le côté scientifique disait que c’était faux, que ce n’était que mythologie, rien de vrai. Mais en quoi la mythologie était mauvaise ? En rien.

C’était une partie importante de l’histoire ancienne, finalement.

Et puis rien dans l’histoire n’était blanc ou noir.

« Ce serait bien ! »

Il sourit à l’idée que quelqu’un le surveille, le protège, à une autre dimension que ce que sa mère avait fait depuis son enfance, depuis l’apparition de son alice, sa première fièvre due à cet alice, tout ça.

Il réfléchissait à tout ça, prenant le chewing gum, rendant le paquet à Lio.

« Tout ce qui concerne le ciel est pour moi très intéressant. »

Il regarda ce dit ciel visible derrière la fenêtre.

Peut-être lui avait-on donné des cheveux roux pour montrer qu’il adorerait tout ce qui concernait l’espace, comme le soleil, l’étoile qui les éclairait si fort chaque jour.